Les entreprises françaises adeptes du marketing sonore
Entretien avec GIOUX François de SIXIEME SON
Afin d’étayer cette première partie sur la dimension du marketing sonore en France, nous nous sommes tournés vers la première agence mondiale de branding sonore, à savoir SIXIEME SON. SIXIEME SON est un réseau de huit agences à travers le monde dédié à l’identité sonore et la conception sonore auprès des marques. Mr GIOUX, l’Head of Development de l’agence parisienne a ainsi pris de son temps pour répondre à nos questions.
– Pour commencer, pouvez-vous vous présenter ainsi que SIXIEME SON et l’identité sonore ?
Je suis François GIOUX, directeur commercial de l’agence SIXIEME SON. SIXIEME SON est le leader mondial de l’identité sonore au service de 400 marques en France et à l’international.
L’identité sonore c’est la création sur mesure et de façon exclusive une musique, une sorte d’hymne qui va représenter l’ADN, les valeurs, le patrimoine d’une marque. A travers un vocabulaire sonore et spécifique, on va traduire musicalement une plateforme de marque. Ce que l’on va faire une fois que tout ça sera traduit, c’est qu’on va créer un hymne qui sera quelque part la matière brute, qui va nous inspirer pour réaliser toutes les adaptations sur lesquels l’identité va vivre.
Qu’est-ce qu’une adaptation ? C’est par exemple utilisé l’identité sonore sur un support comme Instagram qui va durer 12 secondes pour une story, pour une minute de film corporate qui va s’adresser à un public d’investisseurs ou à un plus large public pour un lancement de produit, c’est l’attente téléphonique, des podcasts, des messages radios. Pourquoi adapte-on à chaque support l’identité sonore ? C’est parce qu’il faut prendre en considération l’aspect expérientiel, l’aspect ergonomique du support. La radio qui est un média monocanal, on ne peut pas le traiter de la même façon que la télévision. La capacité d’interpellation et d’attention doit être plus importante parce qu’on n’a que l’audio. C’est vraiment important d’avoir ces adaptations pour que l’expérience du public exposé à la marque soit la plus positive et la plus favorable possible.
L’identité sonore permet donc de booster l’attention, dans un monde qui est saturé d’images ou on est chacun soumis à plus de 1500 stimuli publicitaires au quotidien. Le dernier vecteur d’attention c’est le son. Le son va donc créer cette capacité d’attention et d’interpellation pour favoriser l’attribution, la notoriété de la marque, mais in fine grâce à l’aspect émotionnel de la musique, créer également une sorte d’attachement et booster l’agrément du public avec la marque. Nous ne sommes pas là uniquement pour faire savoir qui parle, c’est faire comprendre ce que cette marque réalise en matière de produit, de service, de valeurs qu’elle peut véhiculer dans tout son aspect irrationnel. Derrière, l’acheteur doit se demander s’il a envie d’aller plus loin avec cette marque. C’est là que je parle du caractère émotionnel d’une identité sonore.
La quintessence d’une identité sonore, c’est ce que vous connaissez, qui s’appelle le jingle, que nous appelons signature sonore et qui est quelque part un logo audio au même titre qu’une marque à un logo visuel. Nous pensons depuis 25 ans maintenant qu’un logo audio et qu’une signature sonore ce n’est pas une option mais indispensable pour une marque pour incarner toutes ces valeurs de la façon la plus optimale possible. Vous fermez les yeux, vous ne voyez pas le logo visuel, mais par contre vous pouvez toujours entendre la marque.
Et comment je suis arrivé chez SIXIEME SON ? Je suis diplômé d’une école de commerce. J’ai commencé ma carrière dans les médias, côté régie publicitaire. Pour rappel, c’est le département qui commercialise la publicité sur une antenne que ce soit radio, télé, digitale, presse ou autres. C’est un département tellement influent auprès de grand média que ce sont même des filiales à part entières. J’ai commencé ma carrière en radio chez Skyrock, puis au bout d’un an j’ai été contacté par le groupe RTL pour les rejoindre. Le groupe RTL ce sont les stations RTL, RTL2 et Fun radio. J’ai donc commercialisé les stations de radio et toute l’offre d’audio digitale. A la fusion avec le groupe M6 que j’ai rejoint pour continuer mes activités en télévision, radio et digitale. Ce qui m’intéressait dans le groupe RTL c’était qu’au sein du groupe il y avait une volonté d’avoir cet aspect conseil, source de valorisation du média et pas uniquement vente d’espace publicitaire. J’avais besoin de m’identifier à un groupe qui valorise son média. En tant que première radio de France, RTL valorise son média radio auprès de toutes les marques. Et c’est comme ça que j’ai découvert SIXIEME SON qui pour moi était passionnante et experte, et apportait aux marques un traitement sur mesure par la création d’identité sonore. J’ai donc eu la chance de rejoindre SIXIEME SON tout au début de l’année 2020 pour participer à son développement. SIXIEME SON aujourd’hui c’est un bureau en France et 7 bureaux à l’international et un savoir-faire reconnu à travers le monde.
– Qu’apporte SIXIEME SON aux marques ? A quel besoin répondez-vous ?
Aujourd’hui, la musique est traitée de façon très différente par les marques. Vous avez trois options en définitive. L’option d’utiliser une musique libre de droits mais qui ne va aucunement créer de la valorisation pour la marque, elle ne véhicule aucune valeur de la marque. Je prends un exemple, une banque A pourra utiliser une musique qu’une banque B pourrait être utilisée à la virgule près par un concurrent, ou même par un acteur d’un secteur qui n’a rien à voir. Donc vous n’allez même pas appuyer votre propos, vous ne ferez même pas de l’illustration publicitaire. Je prends un exemple, on vient de développer l’identité sonore de la communauté d’agglomération de Versailles, parce que Versailles souhaite vraiment apporter un côté branding à sa ville et notamment draguer Paris 2024. Ils se sont dotés d’une identité sonore exclusive que nous avons créée pour eux. Jusqu’à présent, ils utilisaient une musique d’illustration dite libre de droits, et ils se sont rendu compte en janvier dernier que la marque Twinings fait une pub télé où elle reprend exactement la même musique parce qu’elle est libre de droits et qu’ils ont le droit de le faire. Ils se sont donc dit qu’heureusement que nous vous avons écouté, parce que sinon on aurait été identifié comme Twinings. On aurait été complètement perdu parce qu’en plus ils ont une force de frappe média que nous n’avons pas du tout, il y aurait eu une énorme confusion, on n’aurait pas du tout été compris, reconnu.
L’autre type de musique que vous pouvez utiliser, c’est d’utiliser une musique d’artiste connu. Ce qui va se passer lorsque vous allez utiliser une musique d’artiste connu, c’est que vous allez uniquement faire de l’illustration publicitaire et pas de l’incarnation identitaire. Nous, ce que l’on apporte aux marques c’est cela, c’est de s’incarner, de les habiller sur mesure quelque part. Je ne dis pas qu’il ne faut pas utiliser de musique d’artiste, il faut savoir quelles en sont les limites et pourquoi on les utilise. Renault, un de nos plus gros clients, c’est une marque qui investit tous les jours de l’année sur tous les médias possibles. Forcément, ils vont avoir la tentation d’utiliser une musique connue. Quand ils l’utilisent, ils ponctuent toujours cela de la signature sonore ou d’un territoire sonore. Et pourquoi ils utilisent peu ? C’est qu’ils ont compris qu’au-delà du fait qu’ils ne vont pas incarner leur identité mais uniquement illustrer leur pub, que 9 fois sur 10 l’artiste va être reconnue mais pas la marque. Dans une étude que nous faisons en partenariat avec l’institut Harris, où on interroge 4000 personnes auxquelles on soumet des signatures et identités sonores de marques, on se rend compte que si ce sont uniquement des musiques connues, les gens vont identifier l’artiste mais pas la marque qui utilise cette artiste. Le meilleur exemple c’est Banque Populaire qui utilise depuis 25 ans “I’m Free” de Stevie WONDER. Les gens reconnaissent la musique mais pas la marque. Dans le meilleur des cas, ils reconnaissent le voilier présent dans les pubs car Banque Populaire investit beaucoup en sponsoring de voile. Mais il n’y a pas cette attribution.
On apporte aux marques ce caractère de “knowkness”, qui permet dans le flux publicitaire d’émerger. Cela engendre un R.O.I publicitaire beaucoup plus important. Prenez l’exemple de But. But qui n’est que le 75ème annonceur français en montant d’investissement pub pluri média, mais grâce à son identité sonore et sa signature, But arrive en 25ème position en matière d’attribution. Cela veut donc dire que grâce à son identité sonore, la marque superforme son investissement publicitaire. Voilà aussi ce qu’on apporte, outre l’attribution, la notoriété, l’incarnation, l’agrément, l’attachement, de façon tangible rapporter un retour sur investissement.
Grâce à l’étude que l’on a menée avec l’institut Harris, on se rend compte d’une chose importante au niveau du R.O.I, c’est que vous prenez deux marques qui investissent quasiment le même montant en pub chaque année, qui sont des concurrents directs que sont Renault (420 M€) et Peugeot (400 M€). Vous allez avoir une marque qui va avoir 10 fois plus d’attribution que son concurrent direct grâce à une bonne identité sonore. Une marque qui va aussi avoir une bonne identité c’est une marque qui déploie son identité sur tout son écosystème de marque, sur toutes ses adaptations. Ce qui faut se dire, c’est pourquoi Renault a autant d’avantage par rapport à Peugeot sur cet item de l’identité sonore, c’est uniquement par son traitement en amont. Pourquoi faisons-nous toutes ces études ? Nos clients nous demandent combien de voiture on vend en plus. Évidemment qu’on est incapable de répondre à cette question de façon précise. Mais si on est capable de dire que grâce à nous en matière d’attribution au niveau publicitaire et sur d’autres items, la marque Renault est bien plus performante que son concurrent direct. Si tout le monde fait bien son travail sur la chaîne de valeur comme c’est le cas au niveau branding, normalement ça doit se concrétiser en matière de business en vente additionnel de voitures.
Quand je parle d’écosystème global de marque, voici pour ce qui est selon nous un système performant et les adaptations sur lesquelles il faut décliner son identité sonore de façon cohérente. Cela permet d’être en harmonie avec tout le patrimoine musical et sonore de marque pour être reconnue par le public. Il y a donc l’aspect publicitaire en télé et en radio, la communication digitale qui va être toutes les vidéos sur Youtube et sur tous les supports possibles, des teasers lors d’interviews sur le site de la marque, la communication événementielle, pour la marque employeur, l’attente téléphonique … Et le dernier point de contact, c’est l’espace de retail.
Lorsqu’on travaille avec des retaillers comme Petit bateau, on va créer des playlists sur mesure pour leur boutique. Quand vous avez 8h de musique, évidemment qu’on ne va pas créer 8h de contenu propre. Ce que l’on va faire par contre, c’est qu’on va définir un certain nombre de titres pour une période donnée et qui sera mise à jour pour être diffusée ensuite sur les points de vente. Les musiques seront ponctuées de temps à autre par des moments de marque. Ce qui veut dire, c’est que la voix du petit garçon de Petit bateau va revenir pour rendre l’expérience client la plus favorable possible. Nous faisons la même chose avec Berluti, le chausseur de luxe, avec Brico dépôt par exemple.
– Pour votre agence parisienne, avez-vous essentiellement des clients français ?
Tout d’abord, nous sommes organisés de la manière suivante. Nous avons un département conseil ou un chef de projet et directeur de projet qui vont être les interlocuteurs uniques pour nos clients. Ils vont communiquer avec le département créatif qui est composé de deux directeurs artistiques et de quinze musiciens. Ce hub créatif réalise tous les projets pour tous les clients à travers le monde. C’est volontaire d’avoir centralisé ce hub. Il peut y avoir un directeur de conseil à New York mais dans tous les cas la prestation créative et musicale sera traitée dans les bureaux parisiens. De plus, le fait d’être français sur ce marché apporte une image bonifiée au travail réalisé.
Pour nos clients, nous avons en France des clients étrangers s’ils ont suffisamment d’indépendance et de latitude de décision depuis Paris. La plupart des mastodontes internationaux ont des sièges sociaux centralisés. Une entreprise suffisamment importante va avoir des sièges sociaux régionaux qui vont avoir une capacité de décision limitée et à ce moment-là il va falloir se référer au siège social dont la marque est native. Donc si nous sommes en discussion avec un siège régional, le plus important est de trouver le bon interlocuteur qui aura le pouvoir de décision au sein de la maison mère.
– Quels sont les secteurs d’activités des entreprises avec qui vous travaillez ?
A partir du moment où une marque a une identité, une identité visuelle elle doit selon nous avoir une identité sonore. Tous les secteurs d’activité sont concernés. On pourrait penser que les secteurs d’activité, dit B2C, sont plus concernés parce qu’ils vont avoir une consommation publicitaire que les marques B2B ne vont pas forcément avoir, or lorsque l’on prend le chiffre d’affaires SIXIEME SON, on est sur du 50/50 entre les marques B2B et B2C. On pourrait se dire aussi que certains secteurs d’activité vont être plus représentés, par exemple le secteur du transport. On a fait l’identité sonore de la SNCF, de la RATP, de Vueling, d’Etihad, d’acteurs moins importants comme Breizhgo qui est la régie des transports de Bretagne ainsi que Ilévia à Lille métropole et RTM à Marseille. Pourquoi le secteur des transports est tout de même un secteur phare ? Au-delà des adaptations possibles de l’identité sonore, ce secteur utilise un sonal. La capacité d’attention et d’interpellation est encore plus importante sur ce son. L’idée n’est pas de faire de la communication mais de l’information. Ce sonal est présent dans tous les réseaux de transports et on peut retrouver ce sonal dans les magasins également.
En grande distribution, au-delà des pubs que font Carrefour, Casino ou autres, vous avez des sonals magasin. On pourrait penser que ce sont des secteurs prioritaires mais non.
D’ailleurs, bon nombre de marques nous disent qu’elles n’ont pas besoin d’identité sonore. Mais la marque a pourtant différents points de contact : des vidéos digitales, les réseaux sociaux, a une attente téléphonique, elle a un film corporate qui la représente ou des podcasts… A partir du moment où la marque à des points de contact et un public, elle a potentiellement besoin d’une identité sonore. Après le besoin peut être relatif et être vu plus ou moins comme un besoin prioritaire. D’autres marques nous disent qu’elles font peu de publicité et donc qu’elles n’en ont pas besoin. Justement c’est parce que vous en faîte peu que vous en avez besoin plus que toute autre marque d’avoir une identité, c’est un signe de reconnaissance dans le fil publicitaire qui sera saturé. Plus vous êtes petits, plus vous en avez besoin face aux divers mastodontes. L’identité sonore va vous permettre d’émerger et l’avantage est encore plus important.
– Dans le retail et particulièrement la mode, de la musique est diffusée. Pensez-vous que dans certains secteurs cette stratégie reste à travailler ?
J’ai envie de dire 90% des secteurs or celui que vous venez mentionner. La musique est le parent pauvre du marketing. Les marques vont avoir de gros budgets pour leur film et peu à la musique car depuis la dématérialisation de la musique plus personne ne sait combien coûte le son. Elles ne se rendent pas compte de ce qu’une identité sonore peut coûter. Les marques disent qu’elles peuvent vivre sans car ce sont des marques qui ne traitent pas l’expérience client de la façon la plus qualitative du terme. Vous prenez une marque comme Etihad, ils veulent que tous leurs clients, même ceux qui prennent la classe économique, savent qu’ils sont sur une compagnie aérienne 5 étoiles. Et beaucoup plus qualitative qu’Air France ou autres. Ils veulent que de la réservation à l’embarquement dans l’avion, il y ait vraiment cette expérience de marque. L’embarquement et l’avion pour eux c’est similaire aux points de vente. Ensuite seront ajoutées des variations et subtilités suivantes si vous décollez de jour ou de nuit, votre destination. Cela montre à quel point ce type d’entreprise place le niveau de l’expérience client.
Dans la mode, ce n’est pas parce que l’on va mettre de la musique à fond dans les points de vente, que la musique va faire des ventes additionnelles. Parce que souvent la musique peut être perçue comme étant trop forte justement. Elle doit vous accompagner dans le fait de vous dire que là je n’achète pas juste un jeans, j’achète un lifestyle, j’achète un mode de vie, une promesse de marque. Elle doit faire en sorte qu’au-delà du jeans pour lequel vous étiez entré, que vous achetiez aussi un t-shirt qui va avec. C’est vraiment en quelques secondes capter l’attention du consommateur potentiel, en se disant pour le client que je suis dans cet état d’esprit qu’ils cherchent à me vendre et ça se traduit par un jeans. C’est le lifestyle qui va avec si je prends. Chaque secteur qui attire du public se doit de prendre en considération cet aspect-là.
Je n’ai pas un secteur que j’ai envie de stigmatiser, dans tous les secteurs il y a des bons et des mauvais, mais très clairement, le son est sous utilisé.
– Comment mesurez-vous le R.O.I de vos clients ?
Par un partenariat (avec l’institut Harris) que nous avons développé qui s’appelle le baromètre de performance musicale des marques qui prend en considération le top 100 des marques annonceurs et qui soumet ses 100 identités et signatures sonores à un panel représentatif de la population française, d’environ 4000 personnes sur les items d’attribution, de reconnaissances, notoriété, agrément et attachement. Nous avons une autre étude en partenariat avec Datakalab, qui fait du face tracking, qui permet de mesurer au cas par cas les résultats d’une identité sonore. On soumet au public exposé une vidéo sans musique, puis une vidéo avec une musique d’illustration et enfin une vidéo avec l’identité sonore qui a été créée pour la marque. On se rencontre que la capacité d’attention de la vidéo avec notre travail est de 12 secondes. A partir de 12 secondes, il y a un relâchement. Après à nous d’aménager la musique pour permettre de recréer des temps forts mais de respecter aussi les temps faibles parce que sur 30 secondes, vous ne pouvez pas avoir 30 secondes d’attention, ce n’est pas possible. Et on sait, qu’avec la signature sonore vous allez avoir au minimum 15% d’attention supplémentaire. Grâce à une autre étude, on a pu voir que 68% des français lorsqu’ils regardent la télévision, ils font autre chose. On segmente notre activité. Il y a une sollicitation pluri média qui est tellement importante que près de 7 français sur 10, quand ils regardent la télé, ne la regardent finalement pas. Le son est donc le dernier vecteur pour faire de l’interpellation et de l’attention, et on sait avec cette étude en complémentarité de l’étude Datakalab, que la présence de la signature va engendrer au minimum 15 % d’attention supplémentaire. Voilà comment nous mesurons notre travail. Une autre mesure de notre travail que je ne peux pas partager, c’est une mesure qui émane de nos clients. Nos clients font souvent des post tests, avant et après. Avec des tests avant SIXIEME SON avec des résultats d’attention, de notoriété, d’attribution, et après le travail de l’agence. Je ne peux pas les partager avec vous, c’est car eux-mêmes ne les partagent pas avec nous. Ce que l’on sait, c’est quand un client ne partage pas ses informations là, c’est qu’il est plutôt satisfait. Et quand c’est l’inverse il va plutôt revenir vers nous justement.
– Les marques sont généralement satisfaites de votre travail j’imagine ?
Je ne vais pas vous répondre non. Oui, et pour quelle raison. C’est parce qu’on va prendre un brief de marque très précis, en cherchant à comprendre qui est la marque, comment vous souhaitez être perçue. On va faire un véritable audit de la marque en amont de notre travail. C’est véritablement la première étape.
On va ensuite faire un benchmark de la concurrence. Je prends l’exemple de Renault – Peugeot. Quand on travaille avec Renault en 2015, Renault à une nouvelle plateforme de marque qui est “Passion for life”. On analyse toutes les pratiques musicales et sonores du secteur de l’automobile et on en tire deux conclusions. La première conclusion, c’est qu’il y a deux groupes dans le secteur de l’automobile au niveau musical qui traite l’identité sonore depuis un bon nombre d’années de façon plutôt qualitative. Il y a d’un côté le secteur germano-premium, Audi et BMW notamment qui sont sur des sons froids, métalliques qui incarnent la robustesse. Et puis les constructeurs asiatiques qui sont sur des sons plus synthétiques qui incarnent plus la technologie embarquée. Donc Peugeot qui voulait monter en gamme a voulu faire la même chose que les allemands au niveau de l’identité sonore à tel point qu’ils ont copié les codes de l’identité sonore allemands. Et quand on prend l’étude du baromètre musicale des marques, on se rend compte qu’il y a un véritable problème d’attribution pour Peugeot car il y a une confusion entre Peugeot, Audi et BMW. Donc après avoir présenté ça à Renault, ils sont convaincus qu’il faut faire quelque chose d’assez rupturiste, de maîtriser les codes afin de s’en affranchir. In fine, notre but était de communiquer sur “Passion for life”. Il fallait incarner Renault.
A la suite de ça, on va faire une étape de moodboard. On va faire un collage de sonorité, de certains extraits de musique, qui peut s’apparenter à une playlist. L’idée est de faire réagir le client pour qu’il nous dise son ressenti. Cela permet de mettre des mots sur ce qu’ils veulent précisément et cela nous permet d’avoir tous les éléments en considération pour passer à l’étape clé qui est l’étape de la création d’identité sonore sur mesure. On va leur en proposer 4. Ce sont 4 partis pris créatifs différents. Nous allons leur présenter ces projets lors d’une réunion qui s’appelle le comité d’écoute. Dans ce comité d’écoute, ils nous disent ce qu’ils pensent de ces morceaux. En général, ils en éliminent 2 et gardent 2 finalistes. Ils seront à nouveau retravaillés qui seront présentés dans un second comité d’écoute. Et puis si cela leur correspond, ils choisissent un morceau et on développe les adaptations sur ce morceau. Si jamais ils ne sont pas du tout satisfaits, on élimine les 4 morceaux et on recommence à 0. On préfère prendre le temps de bien faire les choses plutôt que d’avoir un client insatisfait.
D’où ma réponse qui est assez catégorique qui est de dire non nous n’avons pas de client insatisfait parce qu’on a bien pris toutes les informations en amont. On a suffisamment échangé en interne et avec eux durant toutes les étapes et tout le process que dès lors où le projet est dévoilé au grand public, c’est un projet dont tout le monde est fier.
– Sous quelle temporalité travaillez-vous ?
En général le projet est réalisé sous trois mois en moyenne, du premier échange à sa sortie. Après quelle est la durée de vie d’un projet ? Vous savez, plus le temps passe, plus l’identité sonore prend de la valeur, le temps fait son œuvre. Si demain vous vous séparez d’une identité sonore, il est fort à parier que les gens seront nostalgiques. C’est la même chose pour les logos visuels. En moyenne les clients utilisent notre travail pendant 7 ans et c’est ce qui a le plus de succès. En dessous de 3 ans, ce n’est pas que ça ne sert à rien, mais le public n’a pas le temps de s’habituer et la marque n’a pas forcément le temps de créer un storytelling et une histoire d’amour avec le public. C’est pour ça que je dis à nos clients que l’identité sonore il ne faut pas la prendre comme une dépense mais comme un investissement. Elle va prendre toute sa valeur et va faire son travail sur le temps.
Suit ensuite des questions posées par les autres membres du groupe de travail que vous pouvez retrouver dans l’entretien vidéo.